Comment fait-on pour créer un système scolaire qui met en échec même les enfants surdoués ?

Si j’en crois l’applaudimètre, c’est la phrase de ma conférence qui a suscité le plus de réaction des participants au congrès Innovation en Education 2019.

Voici comment on fait :

Est-ce un système « équitable » ?

La définition que je trouve du mot « équité » dans le dictionnaire Larousse est la suivante : Qualité consistant à attribuer à chacun ce qui lui est dû par référence aux principes de la justice naturelle.

Or, « la justice naturelle » étant différente pour chaque être humain, chacun étant unique, doté d’un potentiel, d’une personnalité, de talents différents ; est-ce juste de demander aux enfants de faire les mêmes activités aux mêmes âges et d’obtenir les mêmes résultats dans tous les domaines ?

Ca ne nous viendrait pas à l’idée de demander cela aux adultes ! On n’exige pas d’un musicien qu’il excelle en microbiologie, d’un ingénieur qu’il danse comme une danseuse étoile, d’un chef cuisinier qu’il répare un ordinateur ou une boîte de fusibles, ou à d’un interprète qu’il sache faire du patinage artistique. Alors pourquoi donc est-ce que notre système scolaire exige une telle uniformité de la part des enfants ?

Notre société occidentale a « industrialisé » l’enseignement, tout comme elle a industrialisé l’agriculture, la fabrication des objets et la plupart des savoir-faire. Or, on ne peut pas industrialiser l’apprentissage, car chacun apprend de manière différente.

Les murs des écoles recouverts des « œuvres d’arts » des enfants, toutes identiques ou presque, ne ressemblent-ils pas à une exposition de fabrication en série ?

Les rangées de tables et de chaises, toutes en direction du tableau et du « maître » ou de la « maîtresse »  par trentaines, ne ressemblent-elles pas aux rangées d’ouvriers en usine ?

Le système scolaire français n’est-il pas empreint d’industrialisation (fabrication à la chaîne) et de productivité (fabrication en masse et efficace) par lesquels sont conditionnés les adultes qui proposent de telles activités aux enfants : tous sur la même page, le même jour à la même heure, sous prétexte qu’ils ont le même âge ?

Or, l’enfant n’est pas intéressé par la productivité, mais par la construction de sa propre personne. La productivité et l’efficacité sont des préoccupations d’adultes de pays industrialisés dits « développés ».

Au 21^ème siècle, les Français prennent enfin conscience que l’industrialisation est allée trop loin et que le système scolaire n’est pas adapté ni aux enfants, ni au monde dans lequel ils vivent aujourd’hui et vivront demain.

Les ressources de la terre sont pillées, les sols sont arides, les déchets d’objets fabriqués à la chaîne polluent la terre et la mer, et les êtres humains sont épuisés par le travail industriel. Quel sens peut-on trouver à un mode de vie métro-boulot-dodo ? Est-ce cela que l’on souhaite pour l’avenir de nos enfants ?   

Il ne reste pas beaucoup de place dans notre société industrialisée et productiviste pour être soi, développer ses talents, s’épanouir vraiment, vivre pleinement sa mission sur terre.

C’est précisément ce que proposent les pédagogies alternatives, raison pour laquelle elles connaissent un certain essor depuis quelques années en France, depuis qu’un mouvement de nouveauté et de changement prend de l’ampleur au niveau national.

Montessori a aussi le vent en poupe depuis que les neurosciences ont démontré que sa pédagogie correspond en tout point à la manière dont l’être humain fonctionne, apprend au mieux, se développe au mieux, que ce soit au niveau intellectuel, émotionnel ou physique.

Apprécier l’enfant dans sa globalité, avec son potentiel et ses compétences, ses difficultés et ses challenges, afin de l’aider tout simplement à devenir l’être unique et merveilleux qu’il est appelé à être, n’est-ce pas juste du bon sens ?

Blandine Héaulme-Ricaud

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